En 2021, les éditions Lelivrescolaire.fr s’attaquent à un nouveau challenge de taille : proposer de nouvelles collections innovantes, collaboratives et en libre accès pour les professeurs et élèves de lycées pro ! Depuis un an, nous avons donc la chance de travailler et d’échanger quotidiennement avec des enseignants de la voie professionnelle de tous les horizons.
Nous avons eu envie de leur donner la parole. Le premier thème abordé dans cette série d’interviews est la co-intervention.
Inscrivez-vous 👉ici👈 pour recevoir nos prochains articles, nos sélections de ressources ou des informations exclusives sur nos manuels de pro dans votre boîte mail 😃.
Voici le témoignage de Christine Saintenoy, professeure de gestion au lycée privé technologique et professionnel des métiers du tertiaire Hélène Boucher (Somain). Christine fait de la co-intervention depuis deux ans dans sa classe de seconde GATL, classe commune pour les secondes logistique et gestion administration.
Depuis la dernière réforme de la voie pro, la co-intervention s’est vraiment “institutionnalisée” avec un nombre d’heures définies dans les programmes, etc. Pour vous, concrètement, comment cela s’est-il mis en place ?
Deux situations coexistent dans le lycée : en bac GA, on travaillait déjà à plusieurs collègues en scénarios donc ça n’a rien changé de spécial. Ça a plus bousculé les habitudes des collègues d’enseignement général qui étaient réticents à cette nouvelle pratique.
Dans les autres bacs, c’est plus difficile des deux côtés : trouver une compétence commune, côté pro et côté général, pour résoudre la même problématique est plus délicat.
L’objectif de la co-intervention est de donner du sens aux disciplines et ne pas les cloisonner, mais aussi de créer une continuité dans la séquence, autour de deux compétences différentes mais complémentaires pour la résolution d’une problématique.
Quelle préparation cela implique-t-il en amont, de la part des enseignants ? D’une façon pratique, comment avez-vous organisé le binôme prof général/prof pro ?
On travaille de façon progressive : sur le premier trimestre, on traite les compétences communes (lire les consignes, etc.). L’objectif est que la co-intervention ne soit pas un cours en tant que tel, pas un arrêt, mais dans la continuité.
C’est l’enseignement professionnel qui impulse la co-intervention en ayant besoin à un moment donné d’une autre compétence pour poursuivre. Le schéma est le suivant :
– La séquence d’enseignement pro démarre en classe “classique”. En gestion, les élèves doivent rechercher un lieu de stage. Cela a été l’occasion d’aborder les différents métiers possibles après une seconde GATL. Nous avons abordé ce questionnement en co-intervention en utilisant des vidéos sur des métiers avec des questions pour les élèves.
– Ensuite, en co-intervention, nous avons proposé par groupe de créer des scénettes sur les métiers découverts, puis nous avons filmé en entrepôt (plateforme pédagogique). Ce travail d’écriture des scénarios a été réalisé en co-intervention. Mon collègue travaillait en cours sur la bibliographie, moi en gestion sur les tâches effectuées dans les différents services d’une organisation. Nous nous retrouvions chaque semaine sur un point de la séquence professionnelle qui permettait de travailler sur notre projet, raconter la formation GATL par les élèves en réalisant un film de 3 minutes.
– Enfin, des prolongements s’organisent chacun de son côté : d’autres types de scénarios sont étudiés en cours de français, on gère l’organisation du “tournage” du film en gestion, etc.
Comment la co-intervention est-elle prise en compte dans vos pratiques pédagogiques (programmation sur l’année) ?
On travaille par trimestre, en prenant en compte la progression des 2 enseignants, en identifiant les compétences communes, et en organisant des points de rencontre définis. Il faut faire comprendre aux élèves qu’on a besoin du français pour lire une facture par exemple, des maths pour calculer des pourcentages, etc.
On dispose d’une heure de co-intervention chaque semaine. Les cours en co-intervention ne se suivent pas strictement d’une semaine sur l’autre. En revanche, ils suivent directement les heures de français/maths ou de matière pro qui ont eu lieu entre temps. La continuité est très importante pour que la co-intervention ne soit pas hors sol.
Maintenant que la co-intervention est officiellement présente dans les programmes, qu’est-ce que ça a changé concrètement ?
Les collègues d’enseignements généraux sont ainsi obligés de travailler avec les collègues d’enseignement professionnel et découvrent des choses qu’ils ne connaissaient pas toujours (notamment l’enseignement professionnel). Ils ne sont plus des pions qui intervenaient ponctuellement, ils (re)prennent leur place dans le processus global d’enseignement en lycée professionnel, et s’intègrent davantage à la dimension professionnelle des parcours d’élèves. La co-intervention donne véritablement du sens aux matières générales.
Pour vous, en tant qu’enseignant, quels sont les avantages et les bénéfices dans le travail en co-intervention ? Et pour les élèves ?
L’accompagnement des élèves est plus poussé. La vision qu’ils ont du prof d’enseignement général est différente : il est devenu acteur de la séquence. On se sert du français en règle générale pour tout, ce n’est plus quelque chose de séparé du reste.
La co-intervention a permis de monter des projets ensemble, comme la vidéo de présentation du lycée faite avec ma classe de seconde. La confiance dans les profs est plus grande, on a le temps… et il n’y pas d’évaluation de co-intervention en tant que telle !
Quelles sont les “3 règles d’or” de la co-inter selon vous ?
– Chacun doit apporter son référentiel, ses attendus.
– La concertation pour trouver les compétences communes (2 premières séquences de l’année) doit être profonde.
– Se faire confiance entre collègues ! Dans mon établissement, avec la crise sanitaire, ce sont souvent les cours d’enseignement professionnel qui sont donnés à distance, le prof de français ou de maths se retrouve plus en retrait. Il doit pouvoir s’appuyer sur le collègue d’enseignement professionnel plus souvent au lycée.
Dernière question : avec un peu de recul maintenant, quel est le meilleur souvenir de cours en co-intervention avec vos élèves ?
Cette année, nous avons participé au projet “Je filme ma formation” [//www.jefilmemaformation.tv/]. La vidéo a été réalisée, montée et envoyée pour participer au concours. C’est un projet mené dans le cadre de l’enseignement en co-intervention depuis le début, avec la participation d’un autre collègue du professionnel car nous devions illustrer 2 catégories de métiers, la gestion administration et la logistique. Nous avions besoin d’un autre domaine de compétence. La co-intervention avec le Français a permis de travailler la voix off du film qui n’aurait pas pu voir le jour sans ça. Peu importe le résultat du concours, l’essentiel est de participer. Les élèves ont joué le jeu et, quoi qu’il se passe, on pourra utiliser leur vidéo de présentation sur le site Internet du lycée par exemple. Si on ne gagne pas, on essaiera de faire mieux l’année prochaine !
Vous enseignez en lycée pro ? Inscrivez-vous à notre lettre d’information pour recevoir des ressources inspirantes chaque mois, et tout savoir sur nos nouveaux manuels ! //newsletter.lelivrescolaire.fr/